Correspondence #615
ORDRE DU JOUR.
Quartier général, Milan, 23 prairial an IV (11 juin 1796)
Le général en chef est informé que, malgré ses ordres réitérés, le pillage continue dans l'armée, et que les maisons des habitants des campagnes sont partout dépouillées et dévastées.
Cette conduite infâme de la part de quelques individus, qui aspirent au déshonneur et à la perte de l'armée, ne permet plus au général de différer l'emploi des moyens de rigueur qu il doit déployer pour la con-servation de l'ordre public, et pour le maintien de l'honneur et des lau-riers cueillis par l'armée.
En conséquence, il ordonne:
- Aux généraux divisionnaires et de brigade, sous leur responsabi-lité, de faire arrêter et fusiller, en présence des troupes assemblées, après avoir été jugé par des conseils de guerre, tout militaire, de quelque grade qu'il soit, et tout individu à la suite de l'armée, arrêté en flagrant délit commettant le pillage.
- Les chefs des corps et commandants des compagnies surveilleront la conduite de leurs subordonnés dans les marches, camps ou cantonne-ments, et feront arrêter, sans exception, tout homme accusé de pillage ou trouvé volant; toute négligence de leur part pouvant compromettre le sort des troupes, le général en chef déclare qu'il livrera à des conseils de guerre tout commandant ou officier qui n'aurait pas rempli son devoir à cet égard.
- Il est défendu à tout militaire, administrateur ou agent quel-conque, de lever aucune contribution, de quelque espèce que ce soit, sur l'habitant ou sur les communes, a moins qu'elle n'ait été légalement autorisée par le général en chef ou par les autorités qui en ont le droit. Tout individu qui se permettra d'exiger une contribution en argent ou en denrées sera arrêté et puni par les conseils de guerre, suivant la loi.
L'armée doit sentir que la discipline, la sagesse et le respect des pro-priétés soutiennent ses victoires, que le pillage et le vol n'appartiennent qu'aux lâches; que ceux-ci sont indignes de rester dans les rangs des républicains, qu'ils conspirent la perte de leur honneur et qu'ils n'ont d'autre but que de flétrir des lauriers cueillis par tant de bravoure et de constance.
Soldats, patriotes, républicains, arrêtez ces scélérats, livrez-les au glaive de la loi; vous sauverez l'honneur de l'armée, vous affermirez le triomphe de vos armes; vous aurez un double titre à la reconnaissance publique, par la guerre que vous ferez à la fois aux satellites des despotes et aux hommes immoraux partisans du désordre et de la rapine.
La présente proclamation sera lue à la tête de chaque corps, publiée et affichée dans tous les camps, cantonnements et garnisons.
BONAPARTE