Correspondence #1493
AU CARDINAL MATTEI
Quartier général, Ancône, 25 pluviôse an V (13 février 1797)
J'ai reconnu dans la lettre que vous vous êtes donné la peine de ni ecrire, Monsieur le Cardinal, cette simplicité de moeurs qui vous ca-ractérise. Vous verrez, par l'imprimé ci-joint, les raisons qui m'ont en-gagé à rompre l'armistice conclu entre la République française et Sa Sainteté.
Personne n'est plus convaincu du désir que la République française avait de faire la paix que le cardinal Busca, comme il l'avoue dans sa lettre à M. Albani, qui a été imprimée et dont j'ai l'original dans les mains.
On s'est rallié aux ennemis de la France lorsque les premières puis-sances de l'Europe s'empressaient de reconnaître la République et de désirer la paix avec elle; on s'est longtemps bercé de vaines chimères et on n'a rien oublié pour consommer la destruction de ce beau pays. Je n'entendrai jamais a aucune proposition qui tendrait à terminer les hos-tilités entre la République française et Sa Sainteté, qu'au préalable on n'ait ordonné le licenciement des régiments créés après l'armistice; secon-dement, que l'on n'ait ôté, par notification publique, le commandement de l'armée de Sa Sainteté aux officiers généraux envoyés par l'Empereur. Ces clauses remplies, il reste encore à Sa Sainteté un espoir de sauver ses états en prenant plus de confiance dans la générosité de la Répu-blique française, et en se livrant tout entière et promptement à des négociations pacifiques.
Je sais que a Sainteté a été trompée. Je veux bien encore prouver a l'Europe entière la modération du Directoire exécutif de la République française, en lui accordant cinq jours pour envoyer un négociateur, muni de pleins pouvoirs, qui se rendra à Foligno, où je me trouverai et où je désire pouvoir contribuer en mon particulier à donner une preuve éclatante de la considération que j'ai pour le Saint-Siége.
Quelque chose qui arrive, Monsieur le Cardinal, je vous prie d'être persuadé de l'estime distinguée avec laquelle je suis, etc.
BONAPARTE