Mémoires secrets pour servir à l'histoire de la république des lettres en France (Paris: 1786) 28: 225 (March 19, 1785).

Coeurs sensibles, coeurs fidèles,
Par Beaumarchais offensés
Calmez vos frayeurs cruelles,
Les vices sont terrassés;
Cet auteur n'a plus les ailes
Qui le faisaient voltiger;
Son succès fut passager.

Oui, ce Docteur admirable
Qui faisait hier l'important
Devient aujourd'hui traitable
Il a l'air d'un pénitent.
C'est une amende honorable
Qu'il devait à l'univers
Pour sa prose & pours ses vers.

Le Public qui toujours glose
Dit qu'il n'est plus insolent,
Depuis qu'il reçoit sa dose
Dun vigoureux flagellant.
De cette métamorphose
Il nous apprit le pourquoi;
Les plus forts lui font la loi.

Un Lazariste inflexible,
Ennemi de tout repos,
Prend un instrument terrible
Et l'exerce sur son dos;
Par ce châtiment horrible
Caron est anéanti:
Paveant male nanti.

Goezmann, au gosier d'autruche,
Que la pitié n'amollit,
Au patient qui trébuche,
Répète un dicton qu'il fit:
Tant à l'eau s'en va la cruche
Qu'à la fin elle s'emplit;
Quoiqu'un peu tard, il suffit.

Quoi! C'est vous, mon pauvre père,
Dit Figaro ricanant,
Qu'à coups nombreux d'étrivière
On punit comme un enfant:
Cette leçon salutaire
Apprend qu'un juste retour
A chacun donne son tour.

Bridoison qui voit la fête,
En paraît très satisfait:
Ah! Dit-il, branlant la tête,
Comme un sot il me peignait:
Mais, si je suis une bête,
Avec tout son esprit, ma foi,
Le voilà plus sot que moi!

Sans doute la tragédie
Qu'il nous donne en cet instant
Vaut mieux que la comédie
De cet auteur impudent.
On l'étrille, il peste, il crie
Il s'agite en cent façons:
Plaignons-le par des chansons.